Écoulement d'eau des balcons supérieurs : ni le copropriétaire, ni le syndicat sont en faute

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29 mars 2017

Dans un jugement récent de la Cour du Québec, division des petites créances1, le Tribunal a jugé qu'un copropriétaire de l'immeuble n'avait pas prouvé que l'eau d'arrosage de son voisin, trois étages plus haut, était responsable de la détérioration des surfaces peintes de son balcon. Le syndicat de copropriété, appelé en garantie par le copropriétaire poursuivi, n'en est pas responsable non plus selon le Tribunal.

Les prétentions des parties selon le Tribunal
Le demandeur et le défendeur possèdent des condominiums respectivement situés aux 24e et 27e étages de l'immeuble.
Le demandeur accuse le défendeur d'avoir mal entretenu le balcon de son condominium entraînant ainsi l’écoulement d’eaux usées. Le demandeur lui réclame donc 4 300 $ en dédommagement de dégâts d’eau à son balcon.


Le défendeur nie toute responsabilité et fait intervenir le syndicat des copropriétaires de l'immeuble à titre de co-défendeur, invoquant subsidiairement que c'est le syndicat qui est responsable de l'entretien des parties communes à usage restreint de l'immeuble.

Les faits exposés au Tribunal
Le demandeur est propriétaire de son condominium situé au 24e étage depuis environ quinze ans.
Trois étages plus haut, le défendeur et son épouse sont propriétaires de deux unités de condominium, et ce depuis vingt-cinq ans. Les deux unités comportent deux balcons chacune, pour un total de quatre balcons.


Le demandeur et sa conjointe témoignent à propos d’écoulement d’eaux usées sur leur balcon depuis environ trois ans. Dans leur témoignage ils relient les écoulements d'eaux à l'arrosage de plantes ou le nettoyage des balcons supérieurs par le défendeur.


Ils allèguent que ces écoulements sont réguliers et se poursuivent même l’hiver, entraînant alors la formation de glaçons.
Dans son témoignage, le demandeur explique que les écoulements réguliers endommagent la peinture et le béton des parois de son balcon, de même que certaines tuiles de céramique.


Le demandeur prétend que le défendeur est responsable parce qu'il arrose fréquemment les fleurs et plantes qui garnissent ses quatre balcons durant la saison estivale.
Spécifiquement, le demandeur et son épouse témoignent que les eaux qui endommagent proviennent d'un des deux balcons du défendeur, soit celui situé directement au-dessus de celui du défendeur.

Le défendeur répond à cette prétention en disant que les balcons ont une profondeur de neuf pieds et que les plantes naturelles qu’il y dispose sont placées le long du mur de l’immeuble du syndicat, et non le long des gardes des balcons.
Le défendeur signale au Tribunal que onze autres unités sont situées sur les deux étages qui les séparent (25e et 26e) et qu'il n'a reçu aucune plainte de ces autres copropriétaires à l'effet que des eaux usées d'arrosage tombaient sur leurs balcons.
Le surintendant de l'immeuble a témoigné à l'audience d'avoir vu a une reprise, une quantité importante d'eau sur l'un des balcons du défendeur. Il a témoigné d'avoir inspecté les balcons des unités situées aux 25e et 26e étages, et de n'y avoir vu aucune eau.


Pour sa part, le syndicat a fait témoigner un des membres de son conseil d'administration qui explique que les balcons sont sous la responsabilité du syndicat au même titre que la brique, le toit et les autres parties communes de l'immeuble. Il informe le Tribunal que le syndicat avec l'aide des services professionnels d'un architecte et d'un ingénieur, à mis en place depuis plusieurs années, un programme d'entretien préventif et de planification de travaux de fonds de prévoyance. Dans ce cadre,des travaux d'entretien et de réparation sont effectués annuellement, tel que recommandé par ces professionnels.
L'administrateur a témoigné que des travaux d'envergure furent entrepris il y a trois ans pour réparer le béton de six balcons qui s'effritait et qui posait un danger qui nécessitait une réparation urgente. Dans le cadre de ce processus, le syndicat a inspecté le balcon du demandeur, et il fut déterminé que celui-ci était en bon état au niveau structurel et qu'aucune réparation s'imposait.

L'analyse par le Tribunal :
Le Tribunal a rappelé aux parties que, selon le Code civil du Québec en matière de preuve, c'est le demandeur qui a le fardeau de prouver que sa réclamation est bien fondée selon la prépondérance des probabilités, c'est à dire qu'il est plus probable qu'improbable, que le défendeur a commis une faute qui a causé un dommage au demandeur.


Par rapport aux faits exposés par le témoignage du demandeur, le Tribunal fait remarquer à ce dernier que rien dans la preuve présentée permet au Tribunal de relier les eaux usées aux dommages causés au balcon du demandeur.


Selon le Tribunal, le témoignage du surintendant à l'effet qu'il avait vu une quantité importante d'eau sur le balcon du demandeur à une reprise ne prouve rien qui pourrait permettre le Tribunal de conclure que le défendeur aurait commis une faute.


Le Tribunal remarque que le demandeur n'a jamais demandé d'inspecter le balcon du défendeur, ni les balcons des 25e et 26e étages. Le témoignage du surintendant n'était point convaincant. Il y a aussi le fait que deux étages séparent l'unité du demandeur de celles du défendeur, et le fait que l'immeuble comprend un 28e étage au dessus de l'étage du défendeur.


Le Tribunal remarque qu'en l'absence d'une preuve convaincante, que les allégations contre le défendeur sont plus spéculatifs que concrets, et donc insuffisants pour imputer une responsabilité au défendeur.


Quant au syndicat, le Tribunal précise que selon l'article 1039 du Code civil du Québec, celui-ci doit non seulement administrer la copropriété, mais assurer l'entretien et la conservation des parties communes de l'immeuble. L'article 1077 du Code civil du Québec stipule que la responsabilité du syndicat engage sa responsabilité s'il fait entretenir les parties communes générales et celles à usage restreint, tels que les balcons de l'immeuble. Le Tribunal doit répondre à la question à savoir si le syndicat a commis lui-même une faute.


Le Tribunal a remarqué du témoignage d'un des administrateurs que le syndicat semble prendre l'entretien de l'immeuble sérieusement et qu'il est conscient de ses responsabilités et qu'il agit en conséquence: il a mis sur pied un comité d'administrateurs responsable de l'entretien de l'immeuble et il a employé les services de professionnels pour planifier l'entretien et les réparations majeures, et il agit selon les recommandations de ces derniers.


Selon le témoignage de l'administrateur, la majorité des balcons de l'immeuble sont en bon état selon l'avis des professionnels. Le balcon du demandeur, tout comme d'autres balcons, démontre un léger effritement des surfaces, mais rien qui nécessiterait une intervention spéciale immédiate ou à court terme.


Quant à l'entretien usuel de son balcon, Le Tribunal remarque que le demandeur admet n’avoir fait aucune peinture ou aucun entretien de base de son balcon depuis environ sept ans. Toutefois, les dispositions de la déclaration de copropriété, la loi, et la jurisprudence sur le sujet sont à l'effet qu'il doit assumer les frais d'entretien général de son balcon, et voir lui-même à ce que ce soit fait. Ceci inclut le fait de le nettoyer et de repeindre le béton lorsque celui-ci s'écaille.


Selon le Tribunal, le dédommagement réclamé par le demandeur vise à payer des travaux d’entretien de son balcon et non à effectuer une réparation majeure qui relèverait de la responsabilité du syndicat de copropriété.


Pour toutes ces raisons le Tribunal a alors rejeté la réclamation du demandeur, tant à l'égard du copropriétaire défendeur que du syndicat. Le demandeur fut condamné à rembourser au défendeur et au syndicat leurs frais de contestation de 125$ et 175$ respectivement.


Pour toute question en matière de copropriété, en droit immobilier, n'hésitez pas à communiquer avec notre équipe de juristes spécialisés en la matière.

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